Mon mari, troisième partie
Les trois premiers mois à L’Epiklinik de Zürich ont été épouvantables.
Les médecins ont commencés par sevrer Pierre-Yves des médicaments
qu’il avait depuis plusieurs années et qui s’étaient montrés inefficaces ou du moins insuffisants.
Il s’est donc retrouvé sans protection médicamenteuse.
Donc, les crises se sont multipliées.
Notre toutou Victor n’étant pas admis à l’hôpital,
elles étaient à nouveau indétectables et quotidiennes.
Retour des blessures !!!
Au moins il y avait toujours la présence du personnel hospitalier pour intervenir rapidement.
La séparation a été difficile.
Il se retrouvait isolé dans un lieu où tout le monde parlait suisse allemand.
La distance limitait forcément les visites.
Mes oncles, ma tante et mon cousin ont fait de leur mieux pour lui rendre visite.
Mais ils ne parlaient pas le français et le comprenaient très peu.
Pour la famille de Pierre-Yves, cela faisait tout de même une sacrée distance.
Il y a une chose qu’il avait du mal à gérer.
Les petites frustrations quotidiennes.
Comme par exemple faire tout le tour du bâtiment pour se rendre à la cafétéria
plutôt que passer par les escaliers intérieurs.
Ce jour là il pleuvait.
Vers 9 h. du matin et il les a pris ces fichus escaliers.
Une crise l’a terrassé sur le palier supérieur et il a roulé jusqu’au bas des marches.
Ce n’était pas la première fois qu’il tombait de cette manière,
mais les personnes qui l’accompagnaient l’on relevé et assis sur une chaise.
C’est quelque chose qu’il ne faut absolument jamais faire !
Une chute pareille peu endommager très gravement la colonne vertébrale.
Le jeune interne de service manquait d’expérience.
Les premiers examens montraient une absence totale de réaction dans les jambes et il s’est affolé.
Pierre-Yves, avec la finesse de ses perceptions l’a ressenti et a été persuadé qu’il allait rester paralysé.
Il s’est replié sur lui-même et n’a plus communiqué.
A ce moment là il a espéré mourir.
Pas seulement par désespoir de vivre avec un handicap supplémentaire,
Mais surtout il ne voulait pas que moi, sa femme, je doive vivre avec un mari en chaise roulante.
Cela l’a obsédé durant les pénibles heures suivantes.
Pendant que Pierre-Yves subissait des examens minutieux qui n’annonçaient rien de bons.
Le jeune interne n’arrivait pas à se décider à m’appeler.
Il espérait pouvoir m’annoncer que tout allait bien.
Vers 11 h. les nouvelles étant toujours mauvaises,
Il s’est enfin décidé.
Vers 9 h j’avais eu un malaise et j’avais du quitter mon travail.
Je venais d’arriver chez moi lorsque le médecin m’a téléphoné.
C’était la première fois qu’il avait à annoncer une mauvaise nouvelle.
A cette époque les médecins n’étaient absolument pas formés à cette délicate tâche.
J’espère vraiment que cela a changé.
Je n’ai pas très bonne mémoire, mais cette phrase là je m’en souviens avec une pénible précision.
« Madame, j’ai une très mauvaise nouvelle.
Votre mari est tombé dans les escaliers et j’ai bien peur qu’il ne soit paralysé »
J’ai amené Victor à Rolle
Madame Schick l’a réceptionné à la gare
(merci Madame, vous m’avez été durant toute cette période d’une aide infini)
Et j’ai attrapé le train suivant pour Zürich
J’ai été malade durant tout le trajet.
L’angoisse et le roulis du train, c’était trop pour mon estomac
(pardon pour cette précision)
Si vous avez dû, un jour, passer plusieurs heures dans les WC d’un vieux train en mouvement,
l’œil rivé sur votre montre, avec l’impression que ce voyage ne finira jamais,
vous comprendrez ce que j’ai pu ressentir.
A 17 h. 12 mon angoisse est tombée d’un coup et j’ai instantanément cessé de vomir.
J’ai enfin pu regagner ma place.
Je suis arrivé à l’hôpital à 18 h.
Pierre-Yves m’attendais.
Très pâle
Très fatiguée
Mais souriant.
A 17 h. 12 il avait pu bouger légèrement le gros orteil.
à 17 h 28 il a pu plier la jambe.
à 18 h quand je suis arrivée,
il était épuisé mais vivant et mobile.
Il n’a gardé aucune séquelle de cet accident.
Fin de la troisième partie
Merci de votre attention